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Voyage de la mémoire à Auschwitz

Quand le 27 janvier 1945 les troupes soviétiques du premier front ukrainien pénètrent sur le site d’Auschwitz, en Pologne, ils abordent un lieu presque déserté où errent, hagards, quelque 9 000 survivants – parmi lesquels Primo Levi ou le père d’Anne Frank, Otto. Ceux-là ont réussi à se soustraire à l’évacuation du camp, le 17 janvier, de 58 000 détenus, conduits par les Allemands dans les « marches de la mort ».
Le nom « Auschwitz » va par la suite devenir synonyme de la Shoah (plus en Allemagne qu’en France), du mal absolu ou de la tuerie industrielle, et, le lieu, dès avant la chute du communisme, une destination de voyage mémoriel et cathartique. Alors que les témoins directs de cette période disparaissent peu à peu, des pouvoirs publics à l'initiative d'Eric Ciotti, président du département des Alpes-Maritimes se mobilisent pour « sensibiliser les jeunes générations au devoir de mémoire », comme l’explique Joseph Segura, maire de Saint-Laurent-du-Var et conseiller départemental. Depuis 2004, des dizaines de milliers de collégiens ont pris place dans un avion spécialement affrété par le département à destination de Cracovie, ville située à une soixantaine de kilomètres des camps d’Auschwitz et Birkenau. Le 9 mars, à 6 h 45, près de 200 élèves issus de neuf collèges du département parmi lesquels Joseph Pagnol, Saint-Exupéry et Malraux, accompagnés de leurs enseignants, se sont donc envolés pour la Pologne. Dans un froid glacial (- 10° C), devant le mémorial de Birkenau, un collégien a lu « la complainte du partisan » d’Emmanuel d’Astier de La Vigerie. D’autres élèves ont choisi des extraits de Si c’est un homme de Primo Levi, L’Écriture ou la Vie de Jorge Semprun et Une Vie de Simone Veil. Des mots et des textes qui prennent tout leur sens sur ces lieux, face  au sombre tracé des rails qui sillonnent l’immensité glacée de Birkenau.  Attentifs et graves, les adolescents découvrent les camps de Birkenau et d'Auschwitz  Warren Magnani, est ému. Son arrière grand-père a été déporté dans ce dernier. « Il faut ériger des garde-fous contre ce qui s’est passé ici, et ce travail de mémoire en est un. Les élèves sont profondément marqués par cette expérience qui leur donne une information historique, mais aussi un regard profond sur ce qui s’est produit. Ce site, dès qu’on y pénètre, donne la mesure de l’abomination qui s’y est produite.Près d’un million de personnes y ont été exterminées. Les  araquements, les camps, les chambres à gaz, le musée d’Auschwitz,tout cela produit un choc que j’espère salutaire afin que toute leur vie, ces adultes en devenir soient inspirés par le respect de l’autre et la tolérance », conclut Joseph Segura, au terme d'une journée éprouvante. Pour lui , comme pour Ugo, 14 ans seulement, ce voyage restera un souvenir marquant. « Même si on nous l’explique en classe, on ne peut pas imaginer à quel point ce qui s’est passé est dramatique. Ici, on se rend bien compte que c’était inhumain. Il n’y a pas de mots suffisamment forts."
  • Titre: Voyage de la mémoire à Auschwitz
  • Date de publication: 09 mar. 2017
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